Hallel
Naguila
Chants séfarades de Pâques et autres fêtes
1 disque – 10 pistes – Durée totale: 01:01:52
ED13118
Hallel
Naguila
Chants séfarades de Pâques et autres fêtes
1 disque – 10 pistes – Durée totale: 01:01:52
ED13118
Naguila, ensemble judéo-arabe, est composé de deux artistes juifs d’origine algérienne et de deux artistes marocains de confession musulmane. Hallel est consacré aux chants de Pâques et autres fêtes séfarades selon la tradition constantinoise. André Taïeb, le chanteur, 69 ans, est un disciple de Cheik Raymond et maître dans l’art du Maalouf. Hallel, racine du mot Allelouya, désigne les louanges que l’on adresse à Dieu ; elles appartiennent au livre des Psaumes de David et font partie de la liturgie des jours de fête. «Hallel Ha Mitsri» (Hallel «égyptien») est chanté le soir de Pessah dans chaque famille juive après le récit (Hagadah) de la sortie d’Egypte. Dans la tradition constantinoise la musique qui accompagne le chant appartient au répertoire classique arabo-andalou (Maalouf). Le programme présente un extrait de la cantilation des Dix Commandements en judéo-arabe – en Algérie, à la fin de l’office, cette lecture cantilée était faite en présence du mufti de la ville et d’autres personnalités religieuses musulmanes -, des psaumes (tehilim) dont un extrait des fameux et inédits Psaumes de David, des versets, cantilations, piyoutims (poèmes) et une chanson traditionnelle du répertoire populaire arabo-andalou (Koum-Tara).
«Que l’âme de tout vivant bénisse ton nom éternel notre Dieu et que l’esprit de toute chair glorifie et magnifie ton souvenir, Ô notre roi…»
André Taïeb chant / voice
Kamal Berrada oud, ney
Mohamed Zeftari violon
Pierre-Luc Ben Soussan percussions
1 Hallel
isrc : FRV630000106
2 Les Dix Commandements
isrc : FRV630000107
3 Naguila
isrc : FRV630000108
4 Yaré’ah Yaquar
isrc : FRV630000109
5 Nichmat Kol Haï
isrc : FRV630000110
6 Samaï Shat’araban
isrc : FRV630000111
7 Tehilim (Psaume de David)
isrc : FRV630000112
8 Déror Yiqra
isrc : FRV630000113
9 Osréni
isrc : FRV630000114
10 Yssméh’ou Koum-Tara
isrc : FRV630000115
LES PIYYUTIM
Dans la musique liturgique le hazan-cantor et le paytan (poète-musicien liturgique) ont joué un rôle particulièrement actif dans l’introduction des mélodies étrangères au sein de la musique synagogale. Le cantor (ou le paytan) utilise ses talents poétiques et sa voix pour accroître l’impact émotionnel des prières et sert de pivot de l’office religieux. Il a un rôle à jouer dans le déroulement du service synagogal ; il divertit les convives aux repas rituels de noces, aux circoncisions. C’est lui qui pleure dans une quinah (complainte funèbre), il est présent dans les cérémonies d’offrandes et de dédicaces, dans les pèlerinages des tombeaux de saints, enfin il chante aux réunions et processions organisées par des confréries de lecteurs du Zohar et des Psaumes).
A l’origine les piyyutim – poèmes liturgiques – étaient composés pour rehausser
les prières. Le cadre structurel de la plupart des piyyutim se cristallisa et s’épa- nouit d’abord en Palestine, en Babylonie puis dans d’autres pays.
Au Xe siècle, l’Espagne devint le plus grand centre de production de piyyut. Pendant les cinq cent années qui suivirent, ce genre littéraire fleurit au contact direct de la poésie arabe. Après le XVe siècle et l’expulsion des juifs d’Espagne qui mit fin à l’existence de cette communauté, on vit s’épanouir le piyyut de style espagnol du Yemen jusqu’à la Tunisie, et du Maroc jusqu’à Alep. A la différence du piyyut ancien ou classique, le piyyut espagnol emprunta à la poésie arabe quasidah de nombreuses caractéristiques formelles de pre- mière importance dans le domaine de la rime et du rythme. C’est ainsi que les procédés de la métrique de la poésie arabe furent adaptés à la poésie hébraïque sous le nom de yetodot.
La fidélité des juifs du Maghreb au chant andalou apparaît dans les mécanismes de substitution du texte hébraïque au texte arabe primitif ; le premier se conformant aux lois prosodiques du second ; se pliant ainsi aux exigences de sa métrique et respectant jusqu’à l’emplacement des vocalises de liaison yala-lan et de nanisation (na-na). Les deux versions musicales concordent par- faitement et les lignes mélodiques se recouvrent exactement. Cependant, au niveau de la thématique les textes ne se superposent en aucune façon : le poète juif a des préoccupations qui concernent la foi et la liturgie, alors que les com- positions qu’il adapte sont souvent de caractère profane, véhiculant la poésie lau- dative ou érotique.
Le besoin accru des piyyutim a stimulé la créativité des poétes, imprégnés de mystique, et a créé une poésie riche : les baqqashot. Dans les baqqashot chantés dans la nuit de vendredi à samedi, le répertoire se répartit en plusieurs séries de piyuttim. Inspirés du modèle arabo-andalou de la nouba, ils reflètent une affinité profonde avec la culture environnante.
Soulignons ici le phénomène d’interaction qui existe entre musiciens musulmans et juifs dans le processus de cristallisation et d’évolution d’une tradition commune dans l’univers judéo-maghrébin. Dans ces musiques, il est difficile pour l’observateur de déterminer d’une part ce qui provient de source juive ou de source arabe et d’autre part de distinguer l’innovation de l’emprunt. Ceci permet aux artistes de faire valoir leur créativité et leur virtuosité. L’interprète se fonde sur les don- nées du maqam, concept modal spécifique à la musique du Proche-Orient et des pays du Maghreb. Le musicien y puise la matière première de sa propre composition et le maqam peut ainsi être considéré comme la base permettant de composer une musique en perpétuelle genèse. Dans ce cadre, tout en étant tenus de se conformer à des règles, les musiciens juifs et arabes jouissent d’une assez grande liberté.
LE LIVRE DES PSAUMES (Tehillim)
Dans ce disque, l’ensemble Naguila interprète un certain nombre de psaumes à la manière constantinoise. Les psaumes peuvent être réunis en trois catégories en fonction de leur contenu : les hymnes de louanges, les élégies et ceux dont le propos est didactique. Selon la tradition juive c’est le roi David qui composa ou édita le Livre des Psaumes. Plus que les autres sections de la Bible, le livre des Psaumes était destiné à l’usage liturgique. Depuis la période talmudique, le nombre de Psaumes choisis pour le culte public, les cérémonies domestiques ou d’autres occasions n’a fait que croître, répondant ainsi à la de- mande populaire. On considère que le noyau originel comprenait les Psaumes de Hallel, récités lors des fêtes de pèlerinage, lors de la nouvelle lune et à Hanukah, «le Grand Hallel», lu le Shabbat et les jours de fêtes y compris et les sept Psaumes quotidiens que les lévites avaient coutume de réciter à l’intérieur du temple.
PESSAH ( Pâques)
Le récit de l’événement historique que commémore cette fête (la sortie d’Egypte et les épisodes qui l’encadrent), la description minutieuse de la veillée pascale et les rites du Seder, les liturgies spéciales et les prescriptions légales qui distinguent cette solennité et les manifestations folkloriques qui l’accompagnent sont des repères importants dans la vie juive. La Haggadah contient une description assez concise de la sortie d’Egypte, quelques citations de la Bible, quelques passages du Midrash, des préceptes religieux et des prières ainsi que des hymnes de louanges et d’action de grâce destinées à remercier le Créateur d’avoir accompli de si grands miracles pour Israël. Enfin elle se termine par une aspiration à la rédemption. Le texte de la Haggadah qui est lu par chaque famille autour de la table du Seder est fondamentalement identique dans toutes les communautés ; en revanche, la façon de le lire varie selon les divers types de cantilation traditionnellement en usage dans chaque groupe ethnique. En diaspora, on a l’habitude de publier des éditions bilingues (en ladino, en judéo-arabe, en français) de la Haggadah, afin que le contenu du texte puisse être com- pris par tous les convives. La veillée pascale s’achève par un certain nombre de compositions poétiques chantées, celles-ci marquent généralement la clôture du Seder, dont elle constitue en quelque sorte le final. Comme le Hallel, deux d’entre elles, Ehad mi yodeya et Hag gadya, se signalent plus particulièrement par leur caractère populaire, propre à distraire les enfants.
Sami SADAK
1- HALLEL – MODE : ÇIKA
Le Hallel (louanges) racine du mot Allelouya appartient au livre des psaumes (Tehilim). Il semble probable qu’à l’époque du temple le chœur des lévites chantait le Hallel en réponse à l’officiant. Le Hallel ha-gadol, le «grand Hallel» qui, selon le Talmud (Pas 118 A), comprend le Psaume 136. D’après la tradition, ses vingt-six versets seraient à mettre en parallèle avec les vingt-six générations qui se succédèrent depuis la création du monde jusqu’à la révélation de la Torah sur le mont Sinaï ; tous se terminent par le refrain : “car sa grâce dure à jamais” (ki le-olam hasdo). Il est chanté particulièrement dans chaque famille le soir de la fête de Pâques (Pessah) après le récit (Haggadah) de la sortie d’Egypte. Le verset biblique “le chant sera sur vos lèvres, comme dans la nuit où se célèbre la fête” s’applique au soir de Pessah car c’est la seule nuit consacrée à une fête dans le calendrier religieux. Dans la tradition constantinoise la musique qui accompagne le chant appartient au répertoire classique arabo- andalou (Maalouf).
2 – ASÈRET HA-DIBBÉROT / EL QALMA (LES DIX COMMANDEMENTS) MODE NAWÂ . CHANTÉ EN JUDÉO-ARABE
Ce chant extrait du premier Commandement “Je suis l’Eternel ton Dieu…” est interprété dans la tradition judéo-arabe constantinoise et accompagné au violon. La lecture des Dix Commandements est considérée comme une solennité majeure lors de la fête de Chavuouot (fête où l’on évoque le don de la Thora). Dans les communautés d’influence arabo-andalouse, ce caractère solennel était exprimé non seulement par une grande abondance d’ornementations lors de son interprétation, mais aussi par une modulation intentionnelle qui consistait à passer d’un maqam (mode) à l’autre. Un maqam particulier était destiné à chaque Commandement, ce qui donnait un éclairage particulier à leur contenu spécifique. Les changements de ton ou de note du récitatif ont une signification intellectuelle, autrement dit, les pauses et les arrêts dérivent du texte et de sa ponctuation non de la logique mélodique. Une autre particularité de ce chant est qu’il est chanté en langue arabe, mais lu en caractères hébraïques. Procédé utilisé dans certaines communautés pour utiliser une langue calque et traduire les textes sacrés en langue vernaculaire, tout en gardant la syntaxe de l’hébreu.
En Algérie, à la fin de l’office, cette lecture cantilée était faite en présence du mufti de la ville et d’autres personnalités religieuses musulmanes.
3- NAGUILA
Cette pièce instrumentale interprétée par un oud, un ney et un req sert d’habitude à accompagner un piyout intitulé Naguila, écrit par un poète contemporain.
4 – YARÉ’AH YAQUAR – MODE : MÂYA
Ce piyyut, composé par le Rav Faradji Chowat au XIXe siècle est chanté pour ac- cueillir les invités lors de la lecture de la Thora pour accompagner l’officiant. “Pleine lune merveilleuse ; l’Eternel a donné la sagesse à Salomon…”
Le mot oreah en hébreu, par un jeu de double sens, est utilisé soit comme la lune naissante qui revient après son cycle, soit comme l’invité. Le mawal intro- ductif est dans le style constantinois et le chant liturgique continue avec un air arabo-andalou rendu populaire par Cheikh Raymond. Le champ musical judéo-constantinois principalement composé de M’ahdjez, les influences de Cheikh Raymond qui révolutionna le style d’interprétation de certaines grandes œuvres de Maalouf et du Aroubi est toujours sensible dans le chant d’André Taïeb.
Ce chant se termine sur un thème musical judéo-espagnol, d’une copla hagio- graphique intitulée «Quando El rey Nimrod».
5 – NICHMAT KOL HAÏ – MODE : ÇIKA
C’est une prière qui se cantile pendant Shabbat avant les «versets psalmiques» qui précédent le schéma et les bénédictions ainsi que dans chaque famille le soir de la fête de Pessah dans la Haggadah.
C’est un hymne composé entre le Ier et le IIe siècles, et appelé dans certains traités talmudiques «Bénédiction du chant». En effet, cet hymne était lu après le “Cantique de la mer Rouge” qui évoque la traversée des fils d’Israël. «Que l’âme de tout vivant bénisse ton nom éternel notre Dieu et que l’esprit de toute chair glorifie et magnifie ton souvenir, Ô notre roi…»
Les cantilations sont dans le style constantinois. Le chant est codifié suivant les hauteurs mélodiques préétablies appelées Tahamims.
Même si le Taham (signe neumatique) indiqué au-dessus ou en-dessous du texte reste invariable, le mode musical et l’ornementation changent selon les différentes traditions musicales des communautés.
6 – SAMAI SHAT’ARABAN – MODE : SHADARABAN
Cette pièce instrumentale composée par Tanburi Cemil Bey, compositeur et musicien ottoman du XIXe siècle est un saz semai, qui joue un rôle de final dans les suites appelées fasil. Elle utilise le rythme différent de semai pour donner au morceau une couleur et une vie plus intense et pour rendre l’effet final plus convaincant. Il est composé sur un rythme à 10/8, comporte trois couplets alternés d’un refrain et se termine sur un quatrième couplet dans un rythme ternaire qui fait ostensiblement penser à une valse. C’est une œuvre connue par tous les musiciens du monde arabe et du Maghreb.
7- A AVTI KI YSHMAH -TEHILIM (PSAUME 116 DU LIVRE DES PSAUMES DE DAVID) MODE : ZIDÂN. TAQSIM AU NEY.
Psaume chanté dans le “Hallel” les jours de fêtes et le soir de Pessah ; il évoque la sortie d’Egypte.
Selon la tradition juive, c’est le roi David, poète et musicien, qui composa le livre des Psaumes. Le psaume est ici chanté dans la tradition constantinoise. Les Tehilim se chantent à trois ou quatre chantres lors de la veillée funéraire pour soutenir la famille endeuillée. Les chanteurs se livrent pendant toute la nuit à de véritables “joutes modales” qui demandent une grande virtuosité. Ainsi la lecture de ces cantilations est la plupart du temps réservée à des spécialistes.
«J’aimerais que l’Eternel écoute ma voix, mes supplications, qu’il dirige son oreille vers moi…»
8 – DÉROR YIQRA – MODE : MAZMÛM. TAQSIM AU VIOLON
Ce poème (piyyut) de Shabbat est l’œuvre d’un des premiers grammairiens de l’hébreu, Dounach Ibn Labrat. Ce poète, originaire de Bagdad, vécut à Cordoue et à Fès au milieu du Xe siècle. Comme c’est souvent le cas dans les piyyutim on peut lire son nom en acrostiche dans le premier et le second couplets. Le Shabbat considéré comme une reine, est chanté ici comme un jour de liberté. “Il confère la liberté au fils comme à la fille. Il nous protège comme la prunelle des yeux.”
La célébration du Shabbat est entourée d’une solennité toute particulière, elle baigne dans une atmosphère dominée par les doctrines relatives au rôle de l’homme dans la restauration de l’univers cosmique.
9 – OZRÉNI EL HAÏ – MODE : ZIDÂN ET HIJAZ
Ce chant inspiré par le psaume 109 verset 26 est interprété lors des cérémonies de shabbat dans les synagogues de Constantine.
«Sauve-moi Dieu de l’humiliation de mon ennemi ; Ô mon libérateur délivre- moi de ma pauvreté, car j’ai cessé de fauter et me suis élevé. De grâce mon ro- cher, écoute ma voix…»
10 – YSMÉH’OU ACHAMAYIM VÉTAGUEL ARETZ / KOUM-TARA – MODE : ÇI
«Que les cieux se réjouissent et que la terre exulte. Que l’on clame parmi les nations que l’Eternel règne.». C’est un verset que l’on chante à la sortie du Sefer Thora (rouleau de la Thora). Il est chanté ici avec une chanson traditionnelle du répertoire populaire arabo-andalou Koum-Tara.
Ces chants sont suivis par le poème chanté le samedi matin : “El adon al kol amaassim”, louange adressée à Dieu, composé aux alentours des VIIIe et IXe siècles. «Dieu, Seigneur de toutes les œuvres, est béni et exalté par la bouche de tous ceux qui ont une âme.» Il est suivi par le chant arabo-andalou Imchia Rassoul
Direction artistique / artistic supervisor Pierre-Luc Ben Soussan
Enregistrement / recording Christian Noël, studio Cactus (Marseille), décembre / December 2001
Montage / editing Maurice Salaün
En couverture / front cover manuscrit Sarajevo Haggadah Photos : d’après Marcel Mekies
Notice / liner notes by Sami Sadak
Geneviève Begou (english translation)
Direction : Catherine Peillon
COPRODUCTION
ASSOCIATION MOSAÏQUE MUSIQUES P.-L. BEN SOUSSAN
NUMEN
AVEC LE SOUTIEN DE L’ADAMI
Merci à Marcelle Camra Ben Soussan toute l’équipe de Mosaïque Musiques. & Delia Morris
ED13128 – 742495312823
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