l’homme qui plantait des arbres
un texte de Jean Giono © gallimard
musique de Georges Bœuf
Bénédicte Debilly, récitante
Joël Versavaud, saxophones & Claudio Bettinelli, percussions
un texte de Jean Giono © gallimard
musique de Georges Bœuf
Bénédicte Debilly, récitante
Joël Versavaud, saxophones & Claudio Bettinelli, percussions
enregisré le 27 juillet 2013
église du Hameau de Saint-Michel (Hautes-Alpes)
prise de son France Musique
notes
Hervé Cortot, Thierry Durand & Michaël Dian
photos intérieures
Alexandre Chevillard
photo & création graphique
Catherine Peillon
Commande 2017 de l’Espace Culturel de Chaillol, Scène conventionnée Art en territoire des Hautes-Alpes.
Création le 1er aoû2017 au Fayore, Centre culturel valléen du Champsaur Valgaudemar.
Pour cette création, l’Espace Culturel de Chaillol a reçu le soutien de la Direction Régionale des Affaires Culturelles Provence Alpes Côte d’Azur, de la SACEM. Publié avec le précieux soutien du Fonds pour la Création Musicale et de la Fondation Francis et Mica Salabert.
1. La glandée 5’35
2. La traversée du désert 14’58
3. La guerre 4’27
4. Appel 6’42
5. Dialogue avec le vent 3’14
6. Danse des Fonctionnaires 14’16
7. Le regain 3’31
8. Le pays ressuscité 5’15
9. La Gloire d’Elzéard 3’40
par
Michaël Dian
« L’Homme qui plantait des arbres », la partition sonore conçue par le compositeur marseillais Georges Boeuf sur le texte de Jean Giono, a été créée à Gap, le 23 mai 2013, à l’issue d’une semaine de résidence accueillie dans la ville. Cette soirée a été précédée d’une avant-première à Marseille, Salle Musicatreize, et suivie d’une série de représentations dans le département des Hautes-Alpes.
Soir après soir, le public a été au rendez-vous, réceptif, immédiatement emporté par la beauté et la simplicité du texte de Jean Giono. Ce texte diffuse un enthousiasme communicatif, que souligne et magnifie la sobriété choisie et le lyrisme subtil de la musique composée par Georges Boeuf.
On s’interroge beaucoup sur ce qu’est la création artistique, sa nécessité autant que sa nature. Il n’est pas de réponse aisée, et aucune n’est définitive, évidemment… Au mieux, oserait-on risquer que toute création procède d’un élan profond, d’une poussée secrète ; qu’elle est une réponse à un appel, une promesse de vie. Mais, on sent bien qu’on a peu éclairci la chose en avançant cela…
Que toutes les réalisations qui se parent de ce nom ne soient pas de même portée, que beaucoup d’entreprises échouent, compte peu. Comme ailleurs, la réussite est l’exception et l’on s’efforce beaucoup sans toujours atteindre à ces moments de grâce tant espérés. Mais, parfois, ce qui se joue un soir de première, vient cueillir l’enfant en chacun de nous, et ensoleille un repli de l’âme, émerveillée et pleine de gratitude.
Pour un compositeur, une création est une naissance, et on imagine difficilement combien de travail la précède. C’est l’aboutissement – une étape, et non la fin – d’une démarche créative, intime, qui prend sa source en amont, dans les profondeurs insondables de l’esprit. Chaque oeuvre produite s’inscrit de fait dans une trajectoire personnelle, mais résonne aussi d’autres gestes, d’autres oeuvres, comme l’écho d’une présence, d’une histoire…
Pour les artistes, c’est une responsabilité, immense et particulière : prendre en charge ce qu’un compositeur a entendu, en lui et qu’il a couché, pour partie, sur le papier. Une création est le fruit de longues semaines de travail, de discussions avec le compositeur, de répétitions. C’est aussi un rendez-vous à ne pas manquer le soir de la première.
Pour une équipe, c’est, depuis les premières intentions et bien après le dernier son éteint, une attention de tous les instants, une volonté de rendre possible un moment qu’on devine singulièrement fragile. Chaque jour, on a tâché d’en favoriser l’accomplissement, en cherchant à ce que l’oeuvre en gestation trouve l’espace nécessaire pour advenir et s’épanouir.
Pour le public, c’est accepter de recevoir un geste, fragile et précieux dans son essence. C’est un pari et une preuve de confiance, peut-être aussi d’amitié, si l’on veut bien considérer l’égard et la disponibilité que suppose un tel accueil. En tous cas, c’est le moment d’une rencontre, exceptionnelle en ce qu’elle comporte d’unique et de risqué.
Parfois, l’apparition de l’oeuvre, cette cristallisation complexe de désirs multiples, fait exister la possibilité d’un partage. Ce ne sont plus seulement des interprètes qui jouent la musique d’un compositeur réjoui de l’entendre enfin, un public qui assiste à un concert, une équipe qui accompli ses missions…
C’est, bien au delà des motivations individuelles, un espace qui s’ouvre et se creuse, par l’oeuvre, dans l’oeuvre. C’est cette dimension supplémentaire qui s’invente, s’invite, permet à chaque spectateur de s’harmoniser avec ce qui l’entoure. Chacun écoute, ou plutôt s’écoute dans le retrait que tous effectuent en eux-mêmes, par un effacement provisoire des volontés. Comme une manière de communion, simple et paisible, désencombrée de toute justification.
J’ai eu le sentiment que « L’Homme qui plantait des arbres » nous a offert cette possibilité. J’en ai reconnu la saveur. Le berger Elzéard, dont les mécaniques sonores de Georges Boeuf ont dévoilé les pensées généreuses, continue de marcher dans nos coeurs. Sa constance désintéressée, son opiniâtre générosité, ont éveillé pour longtemps des états de l’âme secrètement gardés, et avec ce goût retrouvé, une ardeur nouvelle, comme rafraîchie dans l’eau rapide et l’herbe épaisse des vallées.
Jean Giono est né le 30 Mars 1895 à Manosque dans les Alpes de Haute Provence. Son père, d’origine italienne était cordonnier et sa mère repasseuse. Autodidacte, à la curiosité universelle, il découvrira la Bible, Homère, entre l’échoppe de son père et l’atelier de sa mère. Pour venir en aide financièrement à ses parents, Jean Giono est obligé de quitter le collège en seconde et devient employé de banque. En 1915, il est envoyé au front à Verdun, une expérience qui le marquera profondément. Giono décide de se consacrer à l’écriture et publie en 1929 son premier roman Colline qui remporte le prix américain Brentano. Giono peut quitter la banque et vivre de sa plume : Grasset et Gallimard se le disputent. En 1930, il reçoit le prix Northcliffe pour son roman Regain et est nommé Chevalier de la Légion d’Honneur en 1932. A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, même s’il n’a jamais pris position pour les nazis ou le régime de Vichy, il est accusé de collaboration, emprisonné quelques mois et inscrit sur la liste noire du Comité national des écrivains qui lui interdit toute publication. Ce n’est qu’en 1947 que cette interdiction est levée. En 1953, il reçoit le Prix Littéraire du Prince Pierre de Monaco et entre l’année suivante à l’Académie Goncourt. Giono ne quittera Manosque que pour de brefs séjours à Paris et quelques voyages à l’étranger. En 1953, il obtient le Prix Prince Rainier de Monaco pour l’ensemble de son œuvre. Giono, à la culture immense, universelle, est un auteur qui a peint la nature, dans une langue simple, une écriture dépouillée. Celui qui s’est surnommé «le voyageur immobile» est mort enterré à Manosque, en 1970.
Georges Boeuf, est né à Marseille en 1937. Ses premières compositions sont purement instrumentales, mais en 1969,il fait partie de ceux qui vont installer en France les premiers centres de musique électroacoustique avec le GMEM, dont il a assuré la présidence de 1974 à 2015, devenu depuis Centre National de Création Musicale dirigé successivement par Raphaël de Vivo et Christian Sébille.
En 1988, il crée la classe de composition du Conservatoire de Région de Marseille – dirigé alors par Pierre Barbizet -, établissement au sein duquel il avait enseigné auparavant la Formation Musicale, la technique du son et l’organologie.
Pierre Barbizet, Jean-Claude Pennetier, Roland Pidoux, François Le Roux, Irène Jarsky, Sonia Wieder-Atherton, Daniel Kientzy, Nicolas Miribel, Joël Versavaud, Jacques Dupriez, Bénédicte Debilly, Claudio Bettinelli, Rémi Delangle, le Nouvel Ensemble Moderne de Montréal (direction Lorraine Vaillancourt), le Groupe vocal Musicatreize et le Choeur Contemporain (direction Roland Hayrabédian), les Percussions de Strasbourg, le Quatuor Parisii, le Quatuor Bela, les Solistes de Sofia, l’Ensemble Télémaque sont parmi les principaux créateurs de ses oeuvres.
Son catalogue compte actuellement cent dix oeuvres instrumentales ou mixtes et des partitions pour la scène et le cinéma. Il est le compositeur des cinq derniers films de René Allio.
Georges Boeuf a composé « Le chant de la nature » pour l’exposition permanente de la grande galerie de l’évolution du Muséum d’Histoire naturelle de Paris et l’opéra « Verlaine Paul », créé à l’Opéra de Nancy en 1996, repris à l’Opéra de Marseille en 2003.
Ses dernières œuvres : « Sonate pour violon » créée par Nicolas Miribel à Nice, « Six monodies de l’absence » pour saxophone ténor créée et enregistrée par Joël Versavaud, « Noctua » pour voix et alto sur un texte de Pierre Beltrame pour les quatre-vingts ans de Noël Lee, « Féline » pour clarinette basse créée par Rémi Delangle, « Anderem Ufer » pour Trio créé par Michael Dian, Alexandre Sauvaire et Samuel Etienne, « Fantasmatica sonata » pour violon baryton créée par Jacques Dupriez, « Messe des Cendres » créée par Musicatreize, « Les quatre saisons de Ronsard » pour soprano, alto, ténor, baryton et quatuor à cordes, commande de l’Académie Francis Poulenc à Tours, « Spirale » pour violoncelle, piano et trois percussionnistes créée au Caire par l’Ensemble Symblema, « L’Homme qui plantait des arbres » mélodrame sur un texte de Jean Giono, créé au Festival de Chaillol en 2013, « Couleurs du vent », 2e quatuor à cordes et Partita pour Accordéon, créés à Chaillol successivement par le Quatuor Bela et Elodie Soulard en juillet 2014 et juillet 2016.
En 2015, l’Orchestre Philharmonique de Marseille, le Chœur Contemporain et l’Ensemble vocal Musicatreize ont créé, sous la direction de Roland Hayrabédian « Les neiges éblouies », symphonie en quatre mouvements dans le cadre du Festival « les Musiques 2015 ».